Si pendant plusieurs décennies le trait de caractère qui impressionnait était l’intelligence ou du moins la capacité à activer son intellect, ce n’est plus le cas et nous avons introduit dans notre société un culte de la médiocrité.

Nous vivons dans une société où tout nous est accessible : formations, bouquins, vidéos, personnes de savoir… Nous sommes entourés par des nuages de connaissances sans fin et nous baignons littéralement dedans. Et si Gandhi nous dit d’être le changement que nous voulons voir dans le monde, essayons de voir les méandres de cette manière de vivre.

Tout nous est tellement accessible que nous avons perdu le goût de la recherche et nous prenons donc pour acquis ce qui nous entoure. Prenons le savoir religieux, il nous fallait initialement, parcourir des milliers de kilomètres pour développer une matière auprès d’un professeur. Ce savoir avait un sens, un cheminement long et ils étaient près à parcourir des mois durant afin de s’abreuver de connaissances. Ne vous méprenez pas, je ne suis pas là pour faire des éloges des anciennes générations. Cependant, le fait est qu’à la fin de ce cheminement, il fallait retourner à son habitation ce qui reprenait des mois de chemins. Le savoir était donc mérité, réfléchit, et médité. Nous avons ce même savoir autour de nous mais a-t-il le même goût quand il est autant accessible? 

Ce savoir accessible en quelques clics ne me semble pas dénué de sens encore faut il y apporter un effort intellectuel, là est le noyau central de mon article. Je ne suis pas là pour dépeindre les fléaux de notre génération mais plutôt pour développer des observations qui trainent dans mon cerveau et dans mes notes depuis trop longtemps.  

Constat et postulat:

Le problème n’est pas tant dans l’abondance du savoir qui nous entoure et dont nous prenons pas le temps d’intégrer mais plutôt dans les conséquences psychiques de ce fait : nous sommes habitués à tout obtenir rapidement (chatGPT en est la personnification), en partant de la nourriture jusqu’au savoir. Il nous est donc insupportable de devoir effectuer un effort pour obtenir des informations. De ce fait, lorsque nous avons une question il nous faut avoir la réponse immédiatement. Cela peut paraître absurde pour les plus conscients d’entre vous, mais prenons une situation simple : une personne poste sur les réseaux sociaux une citation d’un livre, pour la plupart ils regarderaient en haut de la citation pour trouver le titre d’un chapitre ou mieux le titre du livre directement mais il peut aussi arriver que cette personne demande directement le nom du livre à la personne l’ayant publiée. Cette situation est absurde bien évidemment et il n’y a aucune gravité à cette question mais cela montre que nous souhaitons obtenir les informations rapidement sans chercher, sans réfléchir et sans effort. 

Plus nous continuons à nous complaire dans l’absence de questionnements, plus il nous sera difficile de nous questionner / de réfléchir et donc d’activer notre intellect. Moins nous réfléchissons de nous-mêmes, moins notre intellect est activé. Cette corrélation positive postule que si nous inversons la tendance et ainsi que nous commençons à nous questionner alors notre intellect s’active et la partie de notre cerveau liée à l’activation de l’intellect se développera. Ne trouvez vous pas ça aberrant qu’on puisse poser des questions alors que la réponse a été dite quelques secondes avant? Ou encore qu’on puisse lire des personnes sur le net dire « j’ai entendu telle chose… j’ai lu telle chose… » sans pour autant être capable ou vouloir questionner et réfléchir sur ce qui est amené?

Il m’arrive, personnellement, d’être ennuyé lorsque je dois répondre à une question qui m’a été posé plusieurs fois alors que la réponse a été dite dans la même storie qui me suscite ces réponses. Ce n’est malheureusement pas rare, ça arrive très souvent qu’on puisse poser des questions qui mériterait quelques secondes de réflexions. Dans ce même sens, tomber sur un TikTok avec un restaurant et le nom du restaurant et lire comme commentaire « adresse? », cette question (manquant d’un verbe, d’un complètement et d’une formule de politesse) illustre parfaitement mes propos. Nous ne vivons pas dans des grottes pour qu’il nous soit aussi difficile de trouver une adresse quand nous possédons le nom d’un restaurant et la ville. Encore une fois en écrivant cela, ça me parait très absurde comme situation et ne devrait pas susciter un article mais toutes ces situations sont la conséquences d’un culte de la médiocrité très présent dans notre génération.

Nous pouvons ici nous demander : quelle est l’utilité d’aller chercher de nous-mêmes ou de réfléchir ? 

Le fait est que nous ne réfléchissons plus vraiment comme nous venons bien de le voir et de le décrire. Nous semblons vivre de manière apaisée alors nous pouvons nous demander quelle serait l’utilité d’activité son intellect lorsque tout nous est à portée de main?

Pour cela, il est important de revenir à la source et à notre guide quotidien, que dis-je notre boussole qui va largement au délà de calculs d’astronomes basés sur les étoiles : l’essence de la vie et nous parlons ici bien évidemment du Divin. 

Albert Camus disait que mal nommer les choses c’est ajouter au malheur du monde, nous allons donc revenir sur des termes importants afin de savoir de quoi nous parlons.

Importance sur le plan psychique et spirituel :

Nous allons utiliser un signe / ayah qui m’anime et qui apporte des éléments de réponses. Nous nous basons ici sur la traduction de notre chère Maurice Glouton, rahimahullah.

Le signe que nous allons lire est dans la sourate Al Baqarah, il s’agit de la ayah 164 : « Vraiment, pour ceux qui font le lien : des signes dans la création des cieux et de la terre et dans la succession de la nuit et du jour, et dans le navire qui vogue sur les flots avec ce qui est utile aux humains, et dans l’eau qu’Allah a fait descendre soudainement du ciel et par laquelle Il a vivifié la terre après qu’elle a été stérile, et sur laquelle Il a dessiné toutes sortes de bêtes, et dans la variation des vents et des nuages, disposés pour servir, entre le ciel et la terre »

إِنَّ فِى خَلْقِ ٱلسَّمَٰوَٰتِ وَٱلْأَرْضِ وَٱخْتِلَٰفِ ٱلَّيْلِ وَٱلنَّهَارِ وَٱلْفُلْكِ ٱلَّتِى تَجْرِى فِى ٱلْبَحْرِ بِمَا يَنفَعُ ٱلنَّاسَ وَمَآ أَنزَلَ ٱللَّهُ مِنَ ٱلسَّمَآءِ مِن مَّآءٍ فَأَحْيَا بِهِ ٱلْأَرْضَ بَعْدَ مَوْتِهَا وَبَثَّ فِيهَا مِن كُلِّ دَآبَّةٍ وَتَصْرِيفِ ٱلرِّيَٰحِ وَٱلسَّحَابِ ٱلْمُسَخَّرِ بَيْنَ ٱلسَّمَآءِ وَٱلْأَرْضِ لَءَايَٰتٍ لِّقَوْمٍ يَعْقِلُونَ

Le mot utilisé pour parler de l’intellect est AQL, ce mot provient de la racine A3 QA LA  ح ق ل  qui signifie plusieurs choses = faire le lien, lier les idées, faire preuve d’intelligence… On peut entendre par là une force forme d’analyse.

On va rester très bref sur cette partie pour ne pas nous étaler, mais n’hésitez pas à développer ces connaissances via le bouquin de Mikaeel Smith nommé With the heart in mind qui évoque assez longuement ce qu’est le Aql ou encore toute autres sources qui peuvent vous aider à comprendre ce principe en profondeur.

S’ensuit dans la ayah, des signes pour ceux qui prennent le temps et l’énergie de faire des liens et donc de réfléchir. Par ce mot, nous entendons que faire preuve d’intellect ne découle pas d’un processus automatique mais est le résultat de notre volonté. Il nous faut réfléchir et nous questionner pour faire preuve d’intellect. Ces deux concepts sont corrélés entre eux. 

Les exemples cités sont des exemples totalement accessible à tout un chacun; cela signifie d’une certaine manière que nous n’avons pas besoin d’aller très loin pour activer notre intellect. Tout est signe à celui qui le veut et donc tout peut être source de réflexion.

La ayah nous indique ainsi que les signes sont accessibles quand nous activons notre intellect en réfléchissant, en comprenant, en faisant des liens.

Jacques Brel disait que la bêtise c’est de la paresse, ça s’illustre par une personne qui lit et qui se dit « ça me suffit ». J’aime aller dans ce même sens tout en le nuançant : l’absence de connaissance (et non la bêtise) est selon moi une paresse et est le résultat de tout ce qui nous entoure et que nous avons développé en introduction.

Dans la pratique:

Concrètement, comment faire preuve d’intelligence et activer notre intellect?

Tout d’abord, il faut nous questionner sur ce qui nous entoure. En sortant du Lac des cygnes, ma copine qui m’accompagnait – Ania, s’est mit à chercher des informations sur comment un opéra fonctionne, quelle est la mise en scène, quels sont les discours sous-jacents etc : n’est-ce pas là l’illustration parfaite de réfléchir sur ce qui nous entoure?

  1. Remettons de l’importance dans le fait de se questionner : il faut questionner le film qu’on vient de voir, nous poser des questions sur ce que nous avons pas compris, sur les animaux qu’on voit, sur les aliments qu’on mange, sur le psychisme de ceux qui nous entourent : des détails très simples mais qui sont pourtant emplis de profondeur à laquelle nous ne faisons que très peu attention.
  2. Aussi, chercher est une condition sine qua non aux questionnements : quand nous arrivons à ces questions sur ce qui nous entoure, des réponses sont en nous-mêmes, mais il faut aussi aller chercher des réponses via de nombreuses sources.
  3. Pour activer notre intellect, il est important de ne pas tout prendre pour acquis et de remettre en questions certaines réponses que nous pensons véridiques. Le but n’est absolument pas d’être une personne dans la contradiction mais simplement de ne pas prendre notre savoir pour acquis. Par exemple, l’une des premières choses que nous apprenons en psychologie est de tout remettre en question que ce soit ce que nous apprenons en cours mais aussi ce que nous allons apprendre dans les années qui suivent, il est important de faire un point sur nos connaissances, les questionner, aller chercher des réponses et remettre en question ce que nous avons en tête;

Pour illustrer nous pouvons prendre le statut d’un enfant qui questionne sans cesse des questions et qui a un émerveillement pour ceux qui l’entoure tant il ne prend pas tout ça pour acquis. Il va donc se poser des questions sur les arbres, sur la banane qui mange ou sur les nuages. Il va chercher des éléments de réponses et sera émerveiller par ce qui l’entoure.

Quel est le but?

Nous le savons que trop bien, tout n’est qu’éphèmére et tout ce que nous possédons ici n’est réellement qu’un emprunt. Nous avons ainsi l’immense responsabilité de prendre soin de tout ce que nous possédons que ce soit notre santé, notre corps mais aussi notre intellect. Nous avons pris l’habitude de prendre pour acquis ce concept sublime mais il est important de revenir sur le principe d’emprunt. Il nous est devenu banal de prendre soin de notre santé physique et mentale mais prendre soin de notre intellect ne nous vient pas vraiment en tête.

Au niveau du cerveau et donc de la psychologie, les parties les plus responsables de l’intelligence sont notamment le lobe frontal et le cervelet. Connus pour se développer jusqu’à nos 25 ans environ, ils ont cependant besoin d’aliments pour être activé. Tout comme la dopamine ne se libère par toute seule, elle a besoin d’un stimulus. Par exemple, en réfléchissant, nous activons ces structures cérébrales. Plus nous les activons, plus elles seront stimulées et donc vous aurez accès à votre intellect plus souvent et plus rapidement.

Ainsi, nous sommes responsables de notre intelligence et de l’activation de notre intellect. Pour rester très factuel je n’ai pas évoqué le domaine de l’intelligence émotionnelle qui se développe grâce à l’activation de l’intellect par la même occasion. 

Il nous est donc de notre devoir de remettre du sens à notre quotidien et cela passe indéniablement par réfléchir et ne plus laisser notre cerveau en pilote automatique.